“ Hey guys how ya doin’ ? I’m Teron, nice to meet you, EN-CHAN-TE. Dude, it’s a cool tee-shirt, I really like it ! You know what ? Paris is an amazing city ! ”
Avec une telle présentation, sans avoir posé une seule question, je peux vous dire que cette entrevue avec Teron Beal débutait sur les chapeaux de roue. Posés dans une chambre du Mama Shelter, nous avons discuté plus de 20 minutes avec l’artiste, dont le premier album risque de conquérir les amateurs de Pop/R&B US. Une révélation ? Pas tellement, puisque ce texan de 35 ans a auparavant écrit dans l’ombre pour les plus grands. Une interview qui s’est avérée vraiment plaisante et pleine d’anecdotes. A l’issue de la rencontre, l’artiste nous a d’ailleurs invité à son showcase de la soirée, au même endroit. L’occasion de le checker à nouveau, de trinquer et d’apprécier ses talents en live.
Parce qu’en plus d’aimer nos tees, Teron Beal correspond le mieux à la définition que l’on se fait du terme “cool”.
SURL : Salut Teron, bienvenue à Paris. Que penses-tu de la ville ?
Teron Beal : C’est une ville géniale. « J’aime beaucoup Paris » [NDRL : il le prononce en français]. Paris pour moi c’est comme New York : même culture, même ambiance, … Mais cette ville a quelque chose de spécial, d’incroyable. Le seul problème ici, c’est apprendre la langue.
Tu as écrit pour des chanteurs pendant de nombreuses années. Pourquoi avoir attendu aussi longtemps avant de sortir un album ?
Tu sais, j’aime faire de la musique, mais c’est beaucoup de travail. Lorsque tu écris pour d’autres artistes, une fois que le morceau est enregistré et mixé, ton job est terminé. Par contre, quand tu chantes, tu dois te lever tôt à 8h du mat’ le lendemain d’un show alors que tu as crié, chanté, dansé, bû…. Puis tu te rends compte que tu n’as presque plus de voix, mais que tu as un autre concert le soir-même. Pendant longtemps, je pense que je fuyais cet effort, cet engagement envers un projet précis. En travaillant avec Michael Jackson, j’ai pu me rendre compte qu’il y a des textes que l’on écrit pour d’autres personnes, mais que parfois il faut écrire des chansons pour soi, pour les chanter. Grâce à lui, j’ai réussi à me concentrer là-dessus et me lancer.
Cela doit être incroyable d’avoir collaboré avec Michael Jackson ?
C’est plus qu’incroyable. C’est genre… Je suis encore un peu choqué. Tu sais c’est marrant, parfois j’en parle à des amis et je me dis, « c’est vraiment arrivé, ce n’est pas un rêve ». Bosser en studio avec lui a changé ma vie, ma carrière. Il m’a ouvert beaucoup de portes. J’ai toujours adoré Michael Jackson, mais je n’avais jamais réalisé qu’il y avait tant de personnes qui l’aimaient jusqu’à ce que je travaille en sa compagnie. Etre proche d’une personne si créative, l’entendre chanter, électriser les foules. Tu te rends compte que tu peux faire ce que tu veux dans la vie. Il a vraiment changé ma vie.
Je dois t’avouer que je trouve tes clips vraiment créatifs : « Dance at my funeral » en stop motion ou encore le récent « New Girl ». Quelles sont tes sources d’inspiration pour tes vidéos ?
Ces deux vidéos ont été réalisées par mon pote suédois Kamisol. Je bosse avec mes amis. C’est une des meilleures choses lorsque tu es artiste indépendant : tu n’as pas de producteurs pour te dire avec qui tu vas travailler, comment doit être la vidéo, quels vêtements tu vas porter ou ce que tu dois dire. Je suis chanceux de travailler avec mes amis : on se respecte mutuellement et notre vision est vraiment complémentaire. On se réunit, on boit, on fume un peu, on se met bien, … Puis d’un coup on se dit : « pourquoi tu ne sortirais pas d’un mur, tu marcherais dans la rue et tout le monde voudrait te toucher parce que t’es en noir et blanc et le reste en couleur ». Fuck it, let’s do it ! C’est ça qui est cool, surtout lorsqu’on a des bonnes réactions telles que la tienne. Merci !
Pourquoi avoir choisi le titre « Liquor Store » pour l’album ?
C’est lié à la chanson de l’album. [Il commence à chantonner l’extrait a cappella] C’est au sujet d’une fille que j’avais rencontré et m’avait retourné le cerveau. En réalité, on a étudié les titres des chansons de l’album et «Liquor Store» collait super bien. Quand tu vas dans ce genre de magasins, tu as le choix entre du champagne, du rhum, de la vodka, du Hennessy… Que des boissons qui te rendent un peu éméchés ! [rires]
Tu veux que tes auditeurs se sentent un peu éméchés en écoutant l’album ?
Yeaaah man ! Je veux savoir cela des auditeurs. Quand j’écris pour d’autres artistes, je sais immédiatement si je vais aimer ou non, si les voix et la manière de chanter vont coller avec mon texte. Cependant, quand je chante, je ne peux pas vraiment savoir ça. Du coup, rencontrer des gens comme toi, ça me permet de comprendre comment les gens ressentent ma musique. En tant qu’artiste, tu cherches toujours à t’améliorer. Je voyage beaucoup pour essayer de m’ouvrir au monde et grandir. Tu vois, il y a un rappeur français, il s’appelle Féfé [il lance sur iTunes le remix de « Wavin Flag’ » avec K’naan]. En restant au Texas, je n’en aurais certainement jamais entendu parler. Je l’ai découvert ici, alors j’ai commencé à écouter ses sons et j’ai remarqué qu’il avait fait parti d’un crew.
Oui, le Saïan Supa Crew.
Yeaaah, c’est ça dont je parle ! [il nous checke, visiblement satisfait]. Bref, en voyageant, tu écoutes un tas d’artistes stylés qui font des sons terribles. J’aime la musique, je ne veux pas entendre seulement quelques sons, mais tout ce qui se fait.
[highlight] »Bosser en studio avec Michael Jackson a changé ma vie, ma carrière. »[/highlight]
On retrouve plusieurs thèmes récurrents dans ton album. L’amour, les filles et les excuses. Tu demandes souvent pardon à travers quelques morceaux, notamment « Gone Now ». Histoire vraie ?
A peu près oui… [rires]. Je suis content que tu m’en parles, c’est vrai que je m’excuse pas mal dans cet album. Dans « Break my fall » également, je chante « je deviens immature dès qu’on parle d’amour ». Ma vie, sur certains points, a été quelque peu égoïste. J’ai la carrière que je veux : je n’essaie pas de devenir riche, ni célèbre, ni de faire péter les bouteilles,… Grâce à la musique, j’ai la chance de rencontrer dans gens dans le monde entier : sans ça, on ne se serait jamais rencontré les mecs ! Malheureusement, en voyageant, c’est aussi dur de rester un petit ami parfait. Mais j’essaie de m’améliorer sur ce sujet.
Si tu devais retenir un morceau de ton album ?
Hum…. En ce moment je dirais « Tomorrow may never come ».
Celle où tu lâches un “je t’aime” en français à la fin ?
En vrai, je dis « What you think » à la fin. Tu sais quoi ? A partir de maintenant, je vais mentir aux gens et leur annoncer que c’est ce que je dis à la fin de la chanson. Le « je t’aime » ça rend vraiment bien, je vais mentir maintenant je te préviens ! Pour en revenir à la chanson, elle exprime que tu dois suivre ton cœur, parce que tu ne sais jamais ce qui va arriver dans la vie. Beaucoup de gens attendent trop longtemps avant de se lancer. Il ne faut pas attendre un moment précis pour vivre sa vie. En côtoyant Michael Jackson, j’ai appris qu’il n’y a pas de limites, mais il faut commencer maintenant. Pas la semaine prochaine, pas quand gagneras plus d’argent, tout de suite. Cette chanson raconte ça : go get it right now. Sur scène, j’essaie d’être à fond par exemple. Mon français est pourri, je pourrais me contenter de balancer deux ou trois « ouais » au public. Sauf que le public ne peut pas répondre à ça. Je me donne à fond pour communiquer avec mon public, quelle que soit la langue.
Avec quel artiste aimerais-tu collaborer ?
Mec… Voyons voir… Prince. Il m’a vraiment influencé. Quand tu écoutes tout le temps un artiste, cela se ressent sur ton travail, même inconsciemment. J’écoute plein de genres différents. Tom Yorke, Radiohead, Sting…
Ah ouais, j’aime beaucoup Police…
Sérieux ? C’est bon ça ! [il chantonne le refrain de Roxanne]… Je pourrais continuer ma liste jusqu’à mardi prochain, tellement il y a d’artistes que j’admire. En plus, j’aimerais collaborer avec eux pas forcément dans le but d’écrire, mais seulement dans le but de me poser et les regarder bosser. Me taire et apprendre. Comme Timbaland, il est tellement frais. Une fois je faisais des arrangements vocaux avec lui. A un moment, il me dit « c’est cool ce que tu fais, tu peux modifier ça et ça ? ». Et là je réponds « euh… ouais ok», j’étais stupéfait. En fait, je ne voudrais pas débarquer et leur demander « mec, j’aimerais écrire pour toi » . J’aimerais simplement m’installer derrière eux et les regarder travailler.
Dernière question : si ta musique était une recette culinaire, quels seraient les ingrédients ?
Très bien… Ca serait une boisson. A Houston, on a un cocktail qu’on appelle le « Dirty Money ». Il y a de la tequila, de l’Hpnotiq, du jus d’orange, un peu de vodka et un peu de limonade. Quand tu le bois, tu ne te rends pas compte que tu vas être complètement déchiré ensuite ! Tu le bois et t’es direct dans l’ambiance. D’ailleurs je fais un showcase ici ce soir, vous venez les gars ? Maintenant qu’on a terminé les trucs professionnels, on pourra boire du «Dirty Money» !
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Un grand merci à Teron Beal et à l’agence Zikom, plus particulièrement Kévin Zavier, pour leur disponibilité et leur gentillesse.