Bourré au son. C’est le titre que je souhaitais donner à cette chronique, n’en déplaise à La Fouine. Entre ses innombrables featurings, ses concerts mouvementés et ses fins de soirée arrosées, l’activité « musicale » de Kid Cudi n’a pas eu le temps de faiblir. Une addiction digne de Weezy. Pour preuve, à peine un an après l’excellent The End of Day, le gosse de l’Ohio délivre le deuxième épisode de sa saga “Man on the Moon”, The Legend of Mr. Rager. Attendu au tournant par le public, Cudder résistera-t-il mieux à la pression du public qu’à l’alcool ? C’est l’énigme que j’étais impatient de résoudre.
Là où Cudi fait vraiment mal, c’est quand il se décide à prendre des risques.
Première certitude, l’univers de l’artiste n’a pas trop évolué avec ce deuxième album, encore fortement influencé par ses compères Plain Pat et Emile. L’atmosphère générale est certes un peu plus ténébreuse, les lyrics plus torturés, on reste dans une ambiance assez mystérieuse et psychédélique. Concrètement, un « Mojo so Dope », « Marijuana », ou un « Mr Rager » auraient pu aisément se caser dans le premier LP. Cela ne remet en rien en cause la qualité de ces morceaux, bien accompagnés par le timbre de voix grave et envoûtant de l’artiste. A ce titre, le flow paradoxal de Cudder n’a pas trop bougé, entre un débit fluide, posé, et une prononciation souvent hachée voire difficilement compréhensible. Une particularité qui me plaît, mais je pourrais comprendre les réticences de certains auditeurs. Sauf que l’effet « découverte » ne se ressent plus aussi intensément…
Une des forces de Kid Cudi, s’est déjà d’être bien entouré, mais pas trop. Peu de featurings, juste le quota nécessaire pour apporter une diversité à l’album sans le transformer en compil’ de DJ. Comme à son habitude, Mary J Blige est irréprochable sur ses deux apparitions (« Don’t Play these song » et « The Worries »), de même que la chanteuse indie St. Vincent sur « Maniac ». Sinon, Cee-Lo ajoute une autre tête à son tableau de chasse, s’accaparant le terrible « Scott Mescudi vs the world » en un seul refrain dont il a le secret.
Là où Cudi fait vraiment mal, c’est quand il se décide à prendre des risques. Pour ça, il faut surtout attendre la deuxième partie de l’album, un peu trop tardivement à mon goût. Si Plain Pat et Emile sont des producteurs fabuleux, Cudi me surprend d’autant plus lorsque d’autres beatmakers se mettent à son service. Souvenez-vous des prods de Ratatat sur le précédent essai… En résultent de vrais bijoux tels que « The End » , l’aliéné « Trapped in my mind », mais surtout le décapant « GHOST! » concocté par le génial No I.D., qui a collaboré aussi sur « Maniac » et « Mr.Rager ». Des sonorités différentes qui démontrent l’étendue du talent de Scott Mescudi dans toute sa diversité. Prend-en de la graine, Drake.
Un très bon album, presque aussi bon que le premier. Plus dark et introspectif – Cudi s’épanche pas mal sur ses anciens (?) problèmes de drogue – mais finalement un peu trop proche dans l’esprit. A l’inverse de son mentor Kanye, qui lui arrive à se ré-inventer à chaque sortie, pour le meilleur ou pour le pire. A moins que les nombreux leaks aient joué en sa défaveur. Faut l’avouer : cette nouvelle mode en vogue qui consiste à balancer des titres pour faire grimper le buzz et satisfaire les groupies, c’est mignon, mais ça détruit un peu l’écoute de l’album. Dommage. Kanye, si tu m’entends…