Est-ce mieux d’avoir un million de fans passifs qui consomment votre musique comme ils enchaînent les cafés, ou quelques milliers de fidèles qui la déguste comme une soupe aux truffes noires de Paul Bocuse ? Nipsey Hussle a fait son choix. Le natif de Crenshaw a pris le game à contre-courant en ne participant pas à la folle course des ventes en première semaine. À l’inverse, il ne vend que des gemmes ultra-limitées et compte sur la partie la plus aisée de son public pour lui permettre de vivre en tant qu’artiste. Interview avec le rappeur qui fascine Forbes.
Nipsey Hussle est non-seulement un artiste exceptionnel, mais il est aussi un entrepreneur hors pair dont beaucoup – pas seulement dans le rap – devraient s’inspirer. Son plus beau fait d’armes à ce jour : avoir été le premier à vendre des mixtapes à 100$. Il en avait écoulé mille exemplaires et Jay-Z en avait même acheté une centaine. Normalement, on ne vous apprend rien.
Avec un physique qui n’est pas sans rappeler Snoop Dogg et une belle série de quatre mixtapes Bullets Ain’t Got No Names, il se fait rapidement un nom dès fin 2009, au point d’être considéré par beaucoup comme le futur chef de file du rap à LA. Qui ne s’est pas trémoussé sur les hits « Hussle In The House » ou « The Hustle Way » ? L’arrivée de Nipsey dynamise la scène californienne, qui est à un tournant. Profitant de l’impact amoindri des anciens (Ice Cube, Kurupt, Daz Dillinger et consort), il a un boulevard devant lui.
Au final, les choses n’avancent pas aussi vite que prévu. Mais c’est presque un choix : Nipsey Hussle ne veut être l’esclave de personne, refuse les deals des majors et s’entête à révolutionner l’industrie du disque. Il quitte Epic Records en 2010 et créé son propre label, All Money In. Tout un symbole. Sa mixtape à 100$ (Crenshaw, 2013) n’est que la première pierre d’un édifice bien plus grand : l’homme récidive et propose, en 2014, son disque Mailbox Money au surprenant tarif de 1000$. Ses idées enfumées, le respect de ses confrères et une fanbase de dingue : Nipsey n’a besoin de rien d’autre, si ce n’est des auteurs dont il s’inspire (Jonah Berger, Pete Diamandis, Michio Kaku, en vrac) qui l’aident à assimiler les concepts de viralité et de monnaie sociale. Des armes de vente qui ont remplacé des armes de gang. Son premier véritable album, Victory Lap, est aujourd’hui plus attendu que jamais.
Sur le sofa du studio de tatouage Eazy Ink, à Paris, l’homme nous a donné un petit tutoriel de vie. #howto