Veerus est à l’affiche de la septième soirée HRZNS le vendredi 10 mars 2017 à La Maroquinerie, à Paris.
En sortant APEX en mai 2012, Veerus laissait entrevoir de belles choses. Le rappeur de Dunkerque montrait, avec ce deuxième projet solo, qu’il avait les armes pour rivaliser avec les rimeurs de cette nouvelle vague dont il est lui aussi issu. Moins en vogue – ou moins pressé -, celui qui a « zéro fan » (« Mauvaise Nouvelle ») ne peut cependant pas se targuer de cumuler les centaines de milliers de vues son compte YouTube. Pendant deux ans, il s’est fait (très) discret et n’a que peu profité de l’exposition que lui offrait son projet et ses collaborations avec Nemir (« Chaque jour ») ou Alpha Wann (« Où on vit »). Mais tout vient à point à qui sait attendre, et Veerus aime prendre son temps. Avec le dix-titres Minuit qui sort le 16 juin 2014, le Nordiste a tout pour remettre les pendules à l’heure.
Première raison qui nous pousse à garder un oeil sur le bonhomme : il sait s’entourer. Ses collaborations artistiques passées ne lui ont pas fait défaut ; ceux qui sont aujourd’hui ses amis n’ont rien perdu de ce qui les avait poussé jadis à featurer avec lui. C’est donc en toute logique qu’on retrouve Philly Phaal (notre dernière interview), Espiiem (notre interview) ou encore Perso Le Turf sur la tracklist de Minuit. Mieux encore : Veerus a la chance de compter dans son proche entourage des beatmakers de renom – et de talent – qui font de plus en plus parler d’eux sur la scène française. Ikaz Boi en tête de file, le mec qui a mis sa griffe sur l’énormissime prod du banger « On est sur les nerfs » de Joke (notre interview). Un million de vues en deux semaines, tout de même. Attention, Ikaz n’en est pas à son coup d’essai : Deen Burbigo nous vantait les qualités de celui qui a aussi produit pour Smoke DZA de TDE lors de notre dernier entretien. D’ailleurs, pour revenir au rappeur de Montpellier, ce dernier a annoncé une collaboration avec le Dunkerquois dans une récente interview : « J’dois collaborer avec Veerus, qui est très fort. »
Avec « Les Étoiles », Veerus nous montre une toute autre facette de sa musique, et l’on se demande même si ce n’est pas sur cette dernière qu’il excelle vraiment. Sur un beat accrocheur et mélodieux comme Ikaz sait très bien les faire, le rappeur y pose la prose lente qu’on lui connait. À une exception près : sur les quatre petites minutes du morceau, lenteur se transforme en puissance et l’impact du phrasé, exprimé via une diction parfaite, n’en est que transcendé. « Tellement d’avance j’ai vu les pyramides en chantier, tellement d’avance j’ai vu naître celle qui m’a enfanté. » Le rap de 2014 est un rap entraînant où les prouesses phoniques ne suffisent plus, où les acrobaties techniques et les jeux de verbes ne garantissent plus, à eux seuls, le succès d’un morceau. Le poids des mots est presque relégué au second plan, derrière la mélodie. On ne décompose plus la musique comme avant en jugeant la qualité du MC d’un côté et celle de la production de l’autre. Seul compte le ressenti global de fin d’écoute.
« Tellement d’avance j’ai vu NAÎTRE celle qui m’a enfanté »
Veerus réussit, comme peu savent le faire, à combiner les deux. Après, bien sûr, tout n’est pas parfait. Ce vendredi 6 juin, on a été faire un tour sur la Péniche de Lille à l’occasion de la release party de son mini-album, sur invitation de Call 911. L’occasion de voir l’artiste nous présenter les dix morceaux de son disque tout en jugeant ses qualités scéniques autour d’une pinte de bière belge. Au final, ça nous a permis de confirmer ce qu’on pensait avant de venir : le rappeur n’est jamais aussi bon que sur une production qui envoie du paté. Vendredi, en terminant son live avec « Les Étoiles », il a pu s’en rendre compte lui-même. L’énergie qu’il développe sur ce morceau le classe dans la haute sphère des rimeurs de l’hexagone. Sur des titres plus nonchalants, moins punchy, se prestation perdait un peu d’entrain et son audience semblait moins absorbée.
On le sait bon, très bon même, stylo en main. « Entre la purple, les écarts, les mêmes projets. Et même fauchés on prie pour que Dieu nous épargne. » Mais on est convaincus qu’il le serait encore davantage en s’éloignant des beats boom-bap lassants, et que sa force d’écriture n’en serait que mise à valeur – à sa juste valeur. D’ici la fin de l’année, on doute que le Nordiste puisse encore se targuer d’avoir « zéro fan ». Et quand on sait qu’un virus peut survivre jusqu’à 17 jours sur un simple billet de banque, on vous laisse imaginer le potentiel de propagation d’un bon disque infecté.