« 2 Bal 2 Neg, tu connais, tu connais, tu connais »: ouais, si tu connais bien ton rap français, sur leur son ta tête t’as déjà hoché. « A suivre »: ceux qui ont saigné 3X plus efficace, le seul et unique album des 2 Bal 2 Neg sorti en 1996, s’en souviennent. C’était le nom d’une outro flamboyante, après un déluge de flows et de lyrics tranchants, déployés sur les beats fournis par deux autres duos : White & Spirit d’une part, et Kilomaître de l’autre, formé par Dj Masta et quelqu’un qui allait prendre une place énorme dans le rap français, un certain Tefa. Un disque symptomatique du saut qualitatif que connaissait le rap français à l’époque, puis dans la foulée, une réputation de groupe de scène s’est forgée.
L’aventure s’est terminée rapidement, au gré des destinées individuelles, évoquées dans ce nouveau morceau. Bisso Na Bisso pour les jumeaux, puis une peine à deux chiffres pour Doc TMC, avant que les 2 Bal se reforment, vers 2006. Le temps faisant parfois les choses, Eben s’est ensuite rapproché d’eux, puis la jonction avec Niro, devenu réalisateur et vivant aux Etats-Unis, semble s’être faite naturellement, pour une série de concerts anniversaire des 20 ans de l’album, l’an dernier.
C’est donc sous ce titre d’ « A suivre » que le quatuor renaît, et le clin d’œil est aussi musical: les plus avertis reconnaîtront le sample de Ted Taylor, utilisé dans l’outro comme dans le morceau culte « Labyrinthe ». Masta l’a retravaillé à la sauce 2016, et les quelques triolets du beat ne devraient perturber que ton oncle resté bloqué sur le deuxième album du Wu-Tang. Le son est efficace, et c’est un réel plaisir d’entendre de nouveau Eben et Niro kicker ça, suite à une absence encore plus longue que pour les deux jumeaux. La façon de poser d’Eben a encore ce supplément d’âme, et ouais, disons-le, il semble n’avoir rien perdu de sa qualité d’interprétation: « seule la mort a pu briser l’armure / y a que l’amour qui aujourd’hui me rassure / Décris mon art comme une oeuvre en peinture / ou d’un maxi pour dénoncer la censure« . La vidéo, réalisée par Niro à partir de leur récente tournée, montre une belle énergie, et d’ailleurs, comme le souligne G-Kill dans une vidéo sur les coulisses du clip, il s’agit seulement du deuxième du groupe. Ce qui laisse songeur, face à la place qu’à désormais prise l’image dans le rap.
De quoi laisser penser aux anciens que le 3ème underground n’est pas mort, et donner envie aux plus jeunes de revisiter l’histoire du rap français, puisqu’un nouvel ep est annoncé pour cette année. Affaire à suivre, donc.