2017, une année rap en 17 actes

mercredi 27 décembre 2017, par SURL. .
L'heure fatidique des bilans de fin d'année a sonné. Sortez les carnets de note, place aux classements qui inondent les réseaux sociaux depuis plusieurs semaines. En 2013, 2014, 2015 ou 2016, pour ne pas remonter trop loin, nous avions segmenté nos tops en séparant et classant albums, sons, clips, tweets et autres éléments marquants de l'année écoulée. En 2017, ère encore plus théâtrale que toutes les autres, nous avons décidé de procéder autrement et de ne plus diviser un spectacle qui n'est jamais aussi beau que lorsqu'il est complet. Un seul bilan, chronologique, avec la crème de la crème de 2017.
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ACTE 16 : 1ER Décembre 2017
Nipsey Hussle a mis le game en échec et mat

« Ce que le public tire de notre musique et de notre concept a une plus grande valeur que 1000$. Ça n’a pas de prix. » En 2015, Nipsey Hussle nous expliquait comment il trouvait des acheteurs pour sa mixtape Mailbox Money, vendue pour la modique somme de 1000 dollars (pas même 999,99, le culot). Deux ans plus tôt, il avait tâté le terrain en écoulant 1000 exemplaires de Crenshaw, vendus 100 dollars pièce. Le but de cette campagne intitulée Proud 2 Pay ? Montrer qu’un artiste établi et sincère, aidé par une fanbase mobilisée, peut vivre en toute indépendance sans prendre une carte de fidélité chez Lustucru. Et au passage, démontrer la pertinence d’un nouveau modèle économique en pleine crise de l’industrie du disque. Les gros poissons du business rap ne s’y sont pas trompés, Jay Z ayant selon la légende acheté une centaine d’exemplaires de Crenshaw en 2013 – cette année-là, le déballage des cadeaux de Noël chez les Carter a dû laisser un souvenir mémorable.

En 2017, pendant que Cardi B exécutait ses money moves, Nispey Hussle n’était pas en reste. Avec moins d’exubérance mais une vision à long remarquablement fine. Il dévoilera en toute fin d’année un deal solide et sans concession avec la major Atlantic – certains parlent de 5 millions de dollars, confirmés à demi-mots sur son le single « Rap Niggas » (« Worth a couple millions, that’s a fact« ). Pas mal pour un rappeur ayant fait un passage express chez Epic Records en 2010, avant de quitter la maison de disques suite à un changement d’équipe dirigeante dont il redoutait les impacts sur son indépendance artistique. Tout cela en gardant un contrôle total sur son label All Money In, que rien ne liera exclusivement avec Atlantic, et en investissant dans sa propre agence de management et quelques boutiques de fringues à LA. « Nipsey n’est pas seulement un MC extraordinaire mais aussi un vrai visionnaire et un entrepreneur innovant« , commenteront les dirigeants d’Atlantic, peut-être un brin troublés par les clauses de négociation posées par Nipsey Hussle et son entourage. Bien sûr, Nipsey n’est pas le premier rappeur dur en affaires – d’après ce qu’on raconte, E-40 aurait à son époque presque laissé les dirigeants de Jive en slip-chaussettes après avoir apposé son paraphe en bas du contrat. Mais cette signature conclut sept années de parcours indépendant quasi-sans faute. Remarquable pour un MC que peu classeraient spontanément dans le haut du panier. Pire encore, il se permettra de narguer ses collègues moins bien lotis sur son premier single chez Atlantic : sur la prod californienne surpuissante de « Rap Niggas », il beugle : « I own the rights to all my raps, nigga« . Ouch.

Une bonne nouvelle n’arrivant jamais seule, Nipsey sortira début 2018 son album Victory Lap, une arlésienne attendue de pied ferme. Dans un rap jeu ou tout va toujours plus vite, où les carrières se font et de défont et où la nervosité des majors les amènent à spéculer plus qu’à temporiser (on se souvient des deux millions lâchés par Sony pour Trinidad James ou de la Motown signant un Rich Homie Quan en difficulté), Nipsey Hussle a montré que la patience et la stratégie à long terme restent les meilleures armes pour sortir par le haut d’un panier de crabes sans y laisser des plumes. Double cursus rappeur-entrepreneur validé pour l’élève Nipsey.

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