Tetra. Le projet tant attendu des C2C a enfin vu le jour ce lundi 3 septembre. Après plusieurs mois à se faire les dents sur l’EP Down The Road et à squatter les festivals en quête du quatuor le plus en vue du moment, la bombe atomique a enfin été larguée en ce jour de rentrée. Pour ma part l’album tournait déjà en boucle dès 00h20 pour profiter de cette orgie le plus rapidement possible. Car après un mois d’aout pauvre en sorties musicales, septembre semble bien parti pour nous tirer de cette syncope sonore qui s’était établie depuis un bout de temps déjà. Tetra – Quatre en Grec – avec sa cover érotico-kawaii s’inscrit naturellement dans le prolongement de l’EP sorti en début d’année, c’est pourquoi on y retrouve les plus gros titres tels que F.U.Y.A., Arcades, The Beat ou encore Down The Road. Une chose est claire, l’éclectisme de cet album ne peut laisser insensible de par sa fraicheur et sa polyvalence. Chacun trouvera son bonheur sur ce LP. De là à en apprécier tous les tracks rien n’est moins sur. Mais l’ouverture d’esprit dévoilée par l’addition des différents genres musicaux explorés en dit long sur la qualité de chacun des turntablists. Plus qu’un album vitaminé, Tetra ressemble à un véritable mix de culture avec ses 14 tracks et ses 14 guests. Un peu trop ? Possible. Cette accumulation de style et d’invités n’entraine t-elle pas un risque de dépersonnalisation grossier du disque ? Réponse en quelques lignes.
Le CD ouvre sur « The Cell » et je me revois à Panoramas en train de bouncer de la tête aux pieds face aux 4 platinistes. Excellent choix d’ouverture sur un fond bien électro avec une ambiance à mettre des Coups 2 Cross à tous les voisins. Potentiellement mortel en live. Ce n’est que le début de ce tour du monde où la pluriethnicité des guests – Usa, Ghana, United Kingdom, Japon, France, Suède – donne un aspect accueillant et sympathique au LP. Cette rencontre à la croisée des genres aboutit après une quinzaine d’années d’existence du groupe. C’est là ce qui les rends invulnérables et leur confère le statut de crew expérimenté délivrant une musique multiculturelle et maîtrisée. Cela se traduit par une nette différence à la production entre les titres avec et les titres sans invité. En effet, le beat est davantage mis en exergue lorsque les C2C se retrouvent entre eux – « Arcades » est un bon exemple – alors qu’à l’inverse il est plus timide et moins atypique lorsqu’un guest vient poser. Point positif ou négatif? Dans ce registre ce n’est pas un défaut mais plutôt une qualité reflétant une certaine maturité et une adaptation harmonieuse de leur talent à la musique contemporaine. En revanche pour nos oreilles ce n’est pas la même histoire. On se laisse entrainer bien plus facilement sur un titre pétillant comme « Delta » plutôt que sur le trop mou « Give Up The Ghost » ou même le caméléon suédois Jay-Jay Johanson ne peut relever un morceau un peu trop pauvre en saveur. Néanmoins c’est cette hétérogénéité qui donne tout son charme à cet album. Sur « Together« , David Le Deunff – du groupe Hocus Pocus – et Blitz The Ambassador nous font voyager le tout sur une production impeccable et variée qui part méchamment en cacahuète à la fin. On n’aurait pas craché sur une ou deux minutes supplémentaires. Après ce morceau teinté aux couleurs de l’Afrique, direction les states avec l’énergisant « Happy » où l’on retrouve un Derek Martin un tantinet répétitif mais diablement efficace. Un gospel-hit en puissance servi sur un plateau par les français.
Le clip d’Arcades:
En plus du featuring légèrement décevant sur Give Up The Ghost, deux autres titres sont un cran en dessous du niveau global de l’album. Sur ces morceaux, les invités éclipsent délibérément les deejays au point de nous faire douter de la provenance du LP. « Because Of You » par exemple est accompagné par le rappeur américain Pigeon John – 8 albums au compteur – mais l’impression générale et le refrain ne sont pas convaincants. Ce n’est pas un mauvais track, mais il dénaturalise grossièrement la musique des platinistes de par son ouverture commerciale. On peine même à reconnaître la patte artistique des DJs si présente jusque ici. Même combat sur « Genius » avec le groupe Gush qui signe une performance en deçà. En revanche un équilibre intéressant est trouvé sur « Kings Season » où le beat se bat en duel avec la délicieuse rappeuse Rita J qui nous crédite d’un sympathique couplet. A noter aussi la bonne prestation du groupe Moongaï pour un résultat final plus que correct. Pour finir, Greem, 20Syl, Pfel et Atom nous convient à un délicieux festin sur « Le Banquet« , sorte de réunion de famille regroupant la crème de la crème du deejaying. C’est simple, on y retrouve les champions de DMC – Disco Mix Club – 2002, 2003, 2006, 2007 et 2011 sans compter que les nantais sont quadruple champions par équipe de la discipline. Faites le compte et bavez devant cette superproduction réunissant 9 des meilleurs DJs de la décennie.
Le Banquet (Feat Tigerstyle, Netik, Rafik, Vajra & Kentaro) :
En conclusion, ce premier album des C2C est une réussite. Tetra est un LP qui se partage et s’apprécie avec excès. Une formule gagnante que ce soit du point de vue commercial et artistique. En effet, le syncrétisme – d’un point de vue culturel – de ce projet le rend accessible à tout public. Le tour de force des 4 artistes réside dans le fait de savoir subtilement jongler sur différentes sonorités tout en définissant un cadre général structuré pour éviter tout égarement. Artistiquement parlant, cet album sonne bien. D’une part car le terrain avait déjà été préparé avec le meilleur EP français de l’année : Down The Road. D’autre part, parce que cette réunion d’invités qui pouvait être inquiétante au départ est au final un succès. Et même si celui-ci est entaché de quelques erreurs de parcours – Genius et Because Of You en tête de gondole – on n’en retiendra certainement que du positif. Vous doutez encore ? Ca tombe bien leur tournée française dure jusqu’en décembre et on ne saurait trop vous conseiller d’aller voir les phénomènes en live. Ce sera l’occasion de prendre non pas une mais bien quatre claques dans la figure.
Le clip de Down The Road :
SURL Magazine remercie Lucie de Mercury Music Group pour nous avoir envoyé l’album.