[Chronique] Travis Barker – Give the Drummer some

vendredi 18 mars 2011, par Joackim Le Goff.


Je considère le rapport entre rap et rock comme une sorte de frères ennemis. Deux genres musicaux populaires rivaux, mais assez complémentaires aussi bien de part leur héritage commun – le blues – qu’à travers leur posture rebelle, insoumise. D’ailleurs, si la fusion de ces genres est actuellement à la mode, en réalité elle ne date pas d’hier. Avec Travis Barker, la nouveauté ne se résume donc pas au simple crossover rock / rap. Elle concerne plutôt son orientation artistique. Le batteur incroyable de Blink 182 a progressivement évolué vers le hip-hop : d’abord par des remix solo et par des prods maisons, pour enfin arriver à un album quasi-exclusivement dédié au rap. Give the Drummer some, c’est le stade finale de cette mutation. Reste à savoir si cette prise de risque s’avère payante.

The Game, Lil Wayne, Bun B, Lupe Fiasco, Pharrell, Steve Aoki, Cypress Hill, Yelawolf, Kid Cudi, etc… Un oeil à la tracklist suffit pour confirmer l’attrait des rappeurs envers Travis. Surtout que ce dernier ne se contente pas d’apposer son blaze sur la pochette, Il a produit quasiment seul ce LP. Prends ça DJ Khaled. La comparaison avec le gueulard s’arrête là, puisque le niveau de qualité proposé est tout autre. Comme tout album rock qui se respecte, Give the Drummer Some ne fait pas trop dans la dentelle. Tous les morceaux secouent violemment la pulpe, à l’image d’un puissant « Let’s Go » qui réunit Twista, Yelawolf, Busta et… Lil Jon. Terrifiant.
Un autre fait assez édifiant : Travis a pris soin d’étudier les univers respectifs des MCs qui ont collaboré sur ce projet. Par exemple, « Cool Head » nous invite dans l’esprit obscur et planant de Kid Cudi, totalement dans son style. Idem pour le flippant « Don’t Fuck With Me », le Slaughterhouse-ien « Devil’s Got a Hold », ou le psychédélique « Jump Down » animé par les Cool Kids. Mentions spéciales à « Carry it » – je suis toujours aussi addict à RZA – ainsi qu’à l’incroyable « If You Want To », qui s’apparente à du NERD shooté aux amphèt’. Les couplets totalement fous de Lupe suffisent à lui faire pardonner son triste Lasers. Top 10 des performances flow-istiques de 2011, BOUM. Agréable également d’entendre un peu de rock sur « On My Own » : le genre de son qui donne envie de faire péter les tricks à Venice Beach avant d’aller draguer les filles au campus.
En ôtant la présence du trop brouillon « Misfits », sur lequel je n’accroche vraiment pas, Give the Drummer some est proche du sans faute. Un album dynamique, aux mélodies assez variées malgré l’omniprésence des drums, qui dépasse honnêtement mes espérances. Travis Barker n’avait pas besoin de ce projet pour prouver qu’il appartenait au gotha des musiciens, mais il a au moins apporté tout son talent de rockeur auprès des puristes du rap. Chapeau.

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