Mardi 6 décembre dernier. Je reçois un sms du collectif l’Original qui me propose d’interviewer Sefyu le lendemain. Ni une ni deux, après avoir récolté quelques questions auprès des autres rédacteurs, je contacte mon acolyte Rachid Sguini (le mec qui pose comme une vraie groupie sur une des photos ci-dessous) pour qu’il m’accompagne. C’est à l’hotel Ibis que nous avons rendez-vous, et après une courte introduction pour lui vanter les qualités de notre site, nous débutons une interview avec un mec sympa, abordable, aux idées claires et aux positions marquées. « J’me présente molotov’hey« .
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(après avoir entamé une discussion sur ces activités actuelles, sur ces derniers concerts…)
SURL : T’es à Toulouse maintenant ?
Sefyu : Non non non, faut pas aller fouiller sur Wikipédia [BAM]. Paris toujours.
Donc, « Oui je le suis », ton dernier album, quels retours as-tu déjà eu de la part de ta communauté de fans ? Ca s’est bien passé ?
Ouais ben, c’est un album qui, après 2 ans et demi d’absence, a été bien reçu. Il s’est bien classé dans le top. C’est vraiment un démarrage qui a été bien je dirais. Ca me donne prétexte à me déplacer, à aller sur scène, à voir des choses. Vraiment, je suis satisfait. Après comme on le sait un album ça se défend sur du long terme. Il faut pas que ça plonge, il faut que ça reste.
La postérité en gros.
Exactement.
[highlight] »On va pas faire de la musique toute notre vie, au bon d’un moment on va s’arrêter, donc on a des morceaux, autant les donner. »[/highlight]
Tu penses que c’est l’album le plus abouti que tu aies fait ?
C’est un album qui reflète et réunit un petit plus mes inspirations sans renier ce que j’ai pu faire auparavant. Il réunit un peu plus toutes ces caractéristiques du premier et du deuxième album. C’est un assemblage un peu de tout ça. Abouti ? Ouais, peut-être. C’est peut-être un album un peu plus mature j’ai envie de dire, avec un peu plus de réflexion, et puis ça allait avec la thématique « Oui je le suis », ça allait aussi dans la continuité de ce que je voulais développer avec « Qui suis-je ? », je suis un peu la chronologie de tout ça. Je voulais arriver à un point de maturité au niveau des thématiques, c’est important.
Est-ce qu’au final tu te satisfais de cette trilogie-là, ou tu te projettes déjà sur un nouvel album derrière ?
Ah non non, je suis déjà dans le prochain album là, je suis déjà parti.
Et c’est encore dans l’optique d’une trilogie ?
Non non, c’est une suite logique de ce que j’ai fait avant on va dire, mais ça sera pas dans le mode interrogatif comme ce que j’ai pu faire avant.
C’était prévu que Oui je le suis soit aussi long ? Parce que vingt-sept titres, ça en fait pas mal, c’est dense.
Non non, c’était pas prévu. A la base on partait sur un dix-sept titres, mais j’ai pas mal enregistré pendant les deux dernières années, et j’avais à coeur de donner plus au public. Ca faisait longtemps que cet album était attendu et qu’on repoussait l’échéance, alors quand on a vu qu’on avait vingt-sept titres à leur donner, on s’est dit pourquoi pas.
Je me rappelle d’halluciner en achetant des skeuds dans lesquels tu avais dix titres et d’autres dans lesquels t’en avais une vingtaine, et je trouvais ça révoltant qu’ils soient vendus au même prix.
Exactement, c’est juste une question de don au public. On va pas faire de la musique toute notre vie, au bon d’un moment on va s’arrêter, donc on a des morceaux, autant les donner. Ca sert à rien de les garder dans un tiroir. Tenez, appréciez.
[highlight] »il y a beaucoup de jeunes qui ont l’impression d’être rejeté, du fait qu’ils n’ont pas assez de représentativité via leur culture, la culture urbaine en gros. »[/highlight]
Du coup, est-ce que tu as eu des inspirations particulières, différentes des albums précédents dans la conception de celui-ci ?
En fait, mes inspirations sont souvent liées aux opérations que j’essaie de faire, à savoir qu’à chaque album je me déplace en France et que j’organise des débats, des rencontres, sur des thématiques diverses, comme le racisme, ou le racisme inter-ethnique qui existe dans les quartiers, sur la mixité sociale, le mariage, etc. J’aborde donc des thématiques qui nous touche par rapport à certains politiques qui jettent en pâture des choses comme ça, en parlant de certains sujets un peu dangereux, comme l’identité nationale par exemple, et c’est vrai que ça correspond souvent à ce que je vais écrire, tu vois ? C’est pour ça qu’à chaque album j’ai des inspirations différentes. Dans le précédent j’avais eu pas mal de débat sur les relations et l’influence des grands frères, des leaders d’opinion, ou de ceux qui peuvent avoir une autorité. Donc j’ai été dans des écoles, dans des lycées, j’ai été à l’école de commerce de Grenoble et j’essaie de poser des questions aux jeunes pour essayer de comprendre le rapport qu’ils ont avec leurs grands frères, leurs petits frères, la hiérarchie avec les soeurs, tu vois ? Souvent on a des petits frères qui veulent se prendre pour les grands frères de leurs grandes soeurs, donc il y a plein de problème comme ça, et ça je l’ai remarqué à travers les démarches que j’ai pu faire, et j’ai vu aussi qu’il y a des problème d’autorité qui sont liés à des problèmes d’appellation. Dans des lycées, tu as des élèves qui me disaient : « Ouais, nous on s’entend pas avec les profs parce qu’ils veulent qu’on les vouvoient. Comme si on été des étrangers. » Alors que c’est une marque de respect, mais là eux pensent « ouais mais eux ils nous tutoient. » C’est pour ça qu’en se posant comme ça des questions toutes bêtes, tu réalises certaines choses. Ca te permet de comprendre des petits phénomènes.
C’est une sorte de démarche par sondage, non ?
Ouais, c’est vraiment l’idée d’approfondir le sujet. Je sais à peu près ce que je vais entendre, ce qui va ressortir, mais c’est bien de chercher davantage. Et puis voilà, les thématiques du coup évoluent selon les albums et selon ces discussions. Dans cet album, j’ai vachement été inspiré par le fait qu’il y a beaucoup de jeunes qui ont l’impression d’être rejeté, du fait qu’ils n’ont pas assez de représentativité via leur culture, la culture urbaine en gros. Ils regardent des séries à la télé qui ne leur correspondent pas, ça leur parle pas, regarder Mimie Mathy qui joue la sorcière, c’est un truc qui leur correspond pas. Eux ils regardent « The Wire », tu vois, ils obligés d’aller taper dans ce genre de série pour s’y retrouver. Je parle beaucoup dans cet album de la fracture qu’il y a avec les médias, avec ce manque de représentativité donc, j’essaie d’en parler, de parler de ces pouvoirs qu’on essaie de conserver, et parfois on s’aperçoit que la redistribution n’est pas bien faite. Les gens veulent s’accaparer les choses, dans « Société secrète » j’en parle aussi. Donc oui, je me projette avec cet album sur des thématiques plus responsables.
Plus politiques ?
Ouais, mais tu sais, on me dit politique, mais j’estime pas que je parle de politique. C’est politique d’un point de vue global. Parler de problèmes sociaux, c’est pas parler de politique pour moi. J’estime que la politique s’inspire de nous, je pense que les politiques s’inspirent de nos vies. Quand je parle de mes problèmes et de la manière dont ils sont exploités dans les hautes sphères, pour moi c’est pas parler politique.
Par rapport à ce que tu disais tout à l’heure, j’avais lu une phrase quelque part qui disait que « Plus belle la vie » était la meilleure série de science-fiction de la télé française, parce que bien que ça se passe à Marseille, t’as pas un mec qui a l’accent marseillais. Ca montre le décalage entre l’image que les gens veulent donner et la réalité.
[Rachid] Il y a même pas de Comoriens dans « Plus belle la vie »…
Ouais y a pas de Comoriens… (rires) Poubelle la vie quoi. La vie serait plus belle avec des Marseillais sans accent.
Sinon, une victoire de la musique, est-ce que ça aide vraiment à tourner en radio et à développer une aura nationale, ou est-ce qu’au final c’est un peu du vent ?
Ca aide un peu. Un petit peu. Pour un artiste comme moi ça aide un petit peu, parce que c’est un argument, et ça aide à vendre, tu vois. Mais c’est difficile d’accès.
[R] Mais est-ce que ça n’enlève pas un peu le côté underground ?
Moi j’ai rien demandé moi. Et puis non, c’est à moi de faire que le côté underground y soit, dans mes positions, dans mes propos, dans mon image, etc. Je comprends ce que tu dis, c’est sûr que par rapport à gens, voir un artiste comme moi gagner les Victoires de la musique, ça leur donne une perception différente. Mais non, je pense que le plus important c’est ce que je reflète, ce que je dégage. Si tu commences à partir sur un propos différent de ce que tu revendiquais, là c’est clair que le changement risque d’être significatif. C’est une reconnaissance.
[highlight] »quand ils t’invitent, ils disent pas l’artiste, ils disent le rappeur, tu vois ce que je veux dire. Quand ils invitent un artiste de pop, ils disent pas le « poppeur ». »[/highlight]
[R] Je sais pas si le rap a vraiment besoin de ça en fait.
Je pense que le rap a besoin de symbole, tu vois ? Symbole ça veut dire quoi, ça veut pas dire que les choses vont changer du jour au lendemain, mais je pense que de voir des artistes de rap dans des compétitions nationales qui regroupent différents artistes de différents genres, et de voir que c’est l’artiste qui a le plus de connotations qui gagne à la fin, c’est un symbole. C’est plus dans ce sens là. Mais crois que pour passer sur des radios et médias plus généralistes, il faut bien plus que ça. Le rap, c’est une éternelle remise en question, par rapport à d’autres genres. Des artistes de pop, de rock, quand ils sortent un album, ils rentrent plus rapidement dans la famille. Ils sont invités chez Arthur, chez machin, limite il y a une sorte de convivialité qui s’installe, donc ils deviennent vite amis de la télé. Mais le rap renvoie à beaucoup d’image, ça renvoie aux quartiers, et les quartiers ça renvoie à l’immigration ! C’est assimilé à immigration, délinquance, et c’est pour ça que le rap est très sensible. Plein de gens ont du mal à comprendre que le rap, c’est une musique française, une musique pratiquée par des artistes pour la plupart nés en France ! Le rap, c’est en France ! Je le dis, c’est con, mais quand tu vois des émissions qui diffuse des compilations de morceaux soi-disant de « variété », ça veut dire quoi la variété ? C’est la diversité non ? Mais on parle de variété française avec trois genres. En France, ils s’en battent complètement les couilles du rap. Ca pourrait rapporter des sous de diffuser du rap, ça ferait de l’audience. Mais c’est pas ça qui est important, c’est important de garder une image, une image culturelle particulière qu’il faut préserver. Il faut pas que Sefyu soit inscrit au même titre que Jacques Brel et Brassens, alors que ces mecs là ils disaient les mêmes choses que nous ! Sauf que eux le disaient avec une mandoline et une guitare ! Nous on raconte ça avec des MPC, avec des samples et des caisses, et ça les gène.
Quand un rappeur est invité à une émission, ils invitent le mauvais garçon...
Voilà. Et quand ils t’invitent, ils disent pas l’artiste, ils disent le rappeur, tu vois ce que je veux dire. Quand ils invitent un artiste de pop, ils disent pas le « poppeur ». Imagine : « Nous avons invité le violoncelliste, le guitariste… » Non, c’est un artiste dans ce cas là.
[R] Mais est-ce que le rap au final, et grâce à ça, c’est pas resté la musique la plus pure ? Etant donné qu’elle est pas aussi « corrompue » que les autres, c’est de la street culture, et par définition, il faut que ça soit street. Ca me ferait chier d’allumer la télé, de mettre TF1, et de tomber sur Oxmo, tu vois ce que je veux dire ?
Après faut savoir que si le rap est diffusé à des heures de grandes écoutes, et que son authenticité reste la même, il n’y a pas de problèmes. Moi tu me vois aujourd’hui avec mon pull à capuche, mes Jordan’s et ma casquette, mais si demain tu me vois dans un contexte différent avec un marcel, une salopette et je sais pas quoi, là tu te dis qu’il y a un problème. Tu te dis : « Peut-être qu’il a envie de rentrer dans le village », il a envie de s’adapter à un autre contexte. Le plus important c’est de garder ton authenticité, peu importe la chaine où tu passes.
On remarque donc que cette question de recherche de soi, ce travail un peu introspectif t’es propre. Est-ce que c’est ce que tu as essayé de développer à travers le concept de « Fuck Sefyu » ?
Lorsque t’écoutes certains forums, t’as l’impression que certains artistes n’ont pas d’autocritique, alors qu’en réalité on la fait, moi je la fais au quotidien. On essaie de se remettre en question tous les jours, en créant une nouvelle action. C’est ça qui fait que le matin tu te lèves et que t’es performant. Faut pas t’accrocher à un bon morceau que t’as fait il y a 5 ans, comme si c’était ton seul rempart, si tu fais ça tu ne fais plus de hit. Pour la production, la création, il faut arriver à se remettre en question, « Fuck Sefyu » ça fait pas de mal.
Sans transition, masquer ton visage, c’est par rapport à ton père ?
Non, il faut pas lire tout ce qu’il y a sur internet, c’est que des rumeurs, les gens qui écrivent ça ne sont jamais venus me poser la question. [BAM] Masquer son visage c’est juste pour souligner le fait qu’on est pas obligé de se montrer pour que sa musique soit reconnue. Quand je suis arrivé dans le milieu, il y avait pas mal de copinage, les artistes de rap avaient un pouvoir. Il y avait des émissions spéciales genre « Boomrush » de Cut Killer, ou « Couvre Feu » de Jacky, « BOSS » de JoeyStarr et d’autres émissions tout au long de la semaine, donc le rap avait vraiment un pouvoir. Mais le problème c’est qu’il y avait pas mal d’artistes qui voulaient garder le business pour eux, d’où le copinage, et la presse écrite jouait un peu ce jeu là aussi. J’ai une anecdote d’ailleurs. A mes début, un grand magazine de l’époque qui n’existe plus, m’avait sollicité lors de ma première mixtape, et c’est comme si j’avais passé un entretien. Il fallait que je passe un casting alors que j’avais déjà été sur des compilations qui avaient pas mal marché, j’était émergent, et à partir de ce moment là je me suis dit qu’il y avait un truc bizarre dans ce métier. On a tendance à dire que le rap c’est dur avec les médias généralistes, mais à l’intérieur même c’est pourri des fois, c’est pour ça que j’ai décidé de ne plus répondre aux interviews, de ne pas montrer mon visage et de ne pas faire de photos. Je voulais juste parler de ma musique, si ça plait tant mieux, si ça plait pas, c’est pas grave. Moi je suis l’artiste le plus populaire que l’on ait jamais vu. (rires)
Sur ton premier album, quand on retire le CD, on peut voir ton visage !
Ouais c’est vrai. C’est l’histoire de dire « je fais ça, mais en fait je m’en fous quoi. » En plus si les gens veulent me voir ils peuvent, j’ai pas de souci avec l’image, j’en ai rien à foutre. Aujourd’hui c’est devenu un concept.
Politiquement t’as quand même fait des choix, et tu t’es bien démarqué en 2007 en disant au moment des élections « il faudra absolument voter, pour stopper Sarko ». 2012 arrive, est-ce que le message reste le même ?
A la base moi, j’ai toujours eu la volonté de répondre à ce genre d’action. Je le fais naturellement parce que je trouve ça intéressant. C’est normal de dire aux jeunes de se sentir un peu plus concernés, aujourd’hui c’est dur quand tu vois dans les quartiers des petits jeunes, ce qu’ils ressentent ça me fait flipper. Ils ont l’impression qu’ils ne servent à rien, genre « on est là mais on compte pour du beurre », et quelque part, en allant voter t’as l’impression de servir à quelque chose. C’est peut-être pas énorme comme contribution, mais il y a une sorte de volonté, un sentiment d’être utile, d’avoir compté, c’est peut être un moteur pour se dire « je vais me lever le matin, je vais faire mes papiers, des démarches, participer à la vie active. » C’est pour ca que voter ça sert aussi. C’est important. C’est pour ça que j’ai toujours ce message en tête. Là dans les rencontres que j’ai effectuées ces dernières semaines, j’ai pas hésité à avoir un petit mot là-dessus. Pour moi il y a tellement de contradictions que parfois je me perds, c’est pas quelque chose qui m’intéresse vraiment, mais je pousse quand même les jeunes à aller voter. Plus il y aura de monde qui ira voter, plus il y aura de portes ouvertes. On a besoin de tout le monde, il y a même des immigrés qui payent des impôts ici mais qui n’ont pas le droit de vote ! Ne serait-ce que pour eux il faut y aller, c’est eux qui payent les salaires des ministres et ils n’ont pas le droit de voter. C’est très contradictoire, et à contre courant de l’Europe. Ici ils ont peur des extrêmes, mais je doute pas que ce soit les immigrés qui fassent pencher la balance.
[highlight] »Aujourd’hui c’est dur quand tu vois dans les quartiers des petits jeunes, ce qu’ils ressentent ça me fait flipper. »[/highlight]
Est-ce que tu trouves que depuis les émeutes de 2005 il y a eu une évolution ?
Il n’y a pas eu d’évolution, non. Il y a une tentative avec Fadela Amara et le groupe Lagardère, ils ont essayé de faire des actions comme la défiscalisation dans les banlieues, etc. Mais au final c’était que de la branlette, il te mettent de la poudre aux yeux et ensuite t’en entends plus parler. Après, quand l’opinion publique est endormie par un nouveau fait d’actualité, comme la grippe H1N1 par exemple, on oublie que celui qui a eu sa voiture brûlée pendant les émeutes et qui ne peut plus aller bosser, il a perdu son taf parce qu’il n’a pas pu arriver à l’heure. Lui, il crève.
Il y a déjà des artistes/rappeurs qui ont donné des intentions de vote, comme Jamel Debbouze, JoeyStarr, ou encore Diams (*cough**cough*), est-ce que toi tu comptes faire pareil ?
Non, moi j’en ai rien à foutre de ça. Moi je dis aux jeunes que s’ils ne veulent pas laisser aux autres les opportunités de choisir à leur place, il faut qu’ils se bougent. Moi je les incite simplement à se présenter aux urnes. Mais c’est pas forcément voter pour quelqu’un, il y a le vote blanc aussi. Il suffit juste que tu te représentes, parce que quand tu vas chercher un emploi ou autre, certains cherchent toujours à savoir si tu participes, si tu payes des impôts, si tu votes… C’est important. Je me souviens qu’en tant qu’artiste dans ma commune, les gens savaient que j’avais pas voté.
Le festival L’Original, tu connaissais ? Qu’est ce que ça représente pour toi ?
Non je ne connaissais pas, mais je suis très enthousiaste ! Nous [ndlr, son équipe] on fait beaucoup de scène, je pense qu’en tant que rap en France, c’est nous qui faisons le plus de scène. On joue autant en Afrique, en Asie, qu’en Russie.
En Russie ?! C’est dur de jouer devant une scène qui n’est pas francophone ?
Non, c’est moins difficile ! Ils comprennent pas trop ce que tu dis, ils réagissent plus à la dynamique, c’est ce qui est intéressant, tu concentres tout sur l’énergie, la technique. C’est une bonne expérience. J’ai joué au Congo dans des stades ; t’arrives dans des configurations inhabituelles, c’est différent psychologiquement.
La réputation de ce festival, c’est que depuis quelques années, ils font venir la crème de la crème, des artistes de qualité genre CunninLynguists, Talib Kweli…
Ah mais oui ! Je connais ce festival, mais je connaissais pas le nom, je savais qu’ils étaient venus.
Ouais, ils font venir des gens comme Ice cube encore, Be Real…
Ouais j’ai joué avec lui, c’était à Belfort. Des scènes internationales, on en a fait pas mal, avec Jay Z en Allemagne et aussi Ice cube, j’ai joué à Madrid avec Common et Xzibit, avce Fat Joe au Gabon, avec 50 Cent au Maroc… J’ai aussi joué avec MOP à Moscou.
Ca fait une belle brochette de noms, et en croisant toutes ces pointures internationales, tu t’es pas dit que tu pouvais essayer des trucs kainris ? Genre le vocoder ?
Non, jamais. C’est important d’avoir une ligne tu sais, si on le fait, c’est que ce sera nécessaire, parce que j’en aurai envie, parce que ça a un sens. Le plus important c’est de faire du bon son. Je suis pas un mec borné sur une façon de rapper, j’aime bien les tendances, j’aime quand ça bouge, quand c’est osé, les prises de risques. Ce me gène pas non plus d’être dans l’air du temps, mais après, il faut que ça me corresponde.
On avait une dernière question un peu spéciale… Qu’est ce que ca veut dire « danse comme un cheval » ?(rires) Parce qu’on a fait des débats de fou en soirée pour savoir ce que ça pouvait vouloir dire.
C’est bizarre, parce que d’autres personnes m’ont posé la question ! En réalité ça veut rien dire, quand j’ai écrit cette phrase là, j’étais en mode freestyle, j’étais même pas dans un délire. Dans la rime, quand j’écris, il n’y a pas de règle. Tu peux faire danser une fourmi comme tu peux faire danser un cheval. Dans ton imaginaire, tu peux faire ce que tu veux, c’est ça la force d’un freestyle, tu fais danser qui tu veux. En fait, « danser comme un cheval » c’est danser comme un imbécile, sans comprendre quoi.
Vous retrouverez Sefyu en avril prochain lors du festival l’Original à Lyon aux côtés d’IAM, d’Orelsan, de Youssoupha ou encore d’1995, dont nous sommes partenaires.