Kari Faux, rap game Daria

mardi 16 juin 2015, par Valentin.

Un jour, on est tombé sur un morceau de Kari Faux. On a trouvé ça assez dingue, sans vraiment savoir pourquoi, et dans la foulée Childish Gambino s’est affiché avec elle. Du coup on a senti nos goûts validés et on s’est plongé tête première dans l’univers de cette rappeuse d’Internet aux multiples atouts. Oh, et elle a un morceau qui s’appelle « Vince Carter » : t’as besoin de raisons supplémentaires pour t’y intéresser toi aussi ?

On entend plus trop le concept de street credibility ces derniers temps. Un slogan phare des années 2000 dont même les médias généralistes s’étaient emparés ; le rap dans les prisme de nos représentations, c’était avant tout un passif. Désormais, si quelques affrontements subsistent pour déterminer qui le plus gros casier judiciaire ou le plus grand nombre de victimes tatoués sur la nuque, il n’y a plus que dans la trap que ça fait vendre des galettes.

Aujourd’hui, et c’est fondamentalement heureux, tu peux te lancer dans le rap sans avoir forcément fait cramer un orphelinat. Et ça, ça permet non seulement de ne pas condamner des orphelins pour alimenter le rap game, mais ça permet également d’aborder d’autres sujets. Non pas que des sujets autres que les .22 ne furent abordés dans le passé, seulement on a le profond sentiment qu’aborder des topics autre que la thuglife ne te classifie plus aujourd’hui comme un « ovni du rap ». Car oui : il n’y a pas plus agaçant que cette classification. Elle segmente, elle clive. Et finalement, elle appauvrit ce qui aurait pu être un dialogue et une évolution enrichissante dans le paysage musical, pour enfin réduire ces élans artistiques a des cas particuliers, des anomalies dans la matrice. #neo

Kari-Faux

Mais grâce à l’évolution des moeurs et des perceptions, des artistes souhaitant poser d’autres sujets sur la table peuvent se manifester et être regardé comme n’importe quel autre acteur du rap jeu. C’est dans cette veine qu’émerge la belle Kari Faux, jeune rappeuse originaire de Little Rock dans l’Arkansas. À 22 ans, elle affiche simplement une fraiche année d’exercice depuis ses débuts – et un premier opus, Spontaneous Generation, paru en février 2012. À la base, Kari c’est une artiste dans le sens plastique du terme. C’est cette raison qui l’a poussé à poser ses valises à Atlanta pour y suivre les cours des Beaux-Arts. Mais bon, après y avoir fait une année, elle constate qu’à Atlanta, les gens sont quand même plus doués en snap music. Elle retourne dans sa hometown avec la ferme intention de faire du son, pour notre plus grand plaisir.

Mais alors,  elle parle de quoi mademoiselle Faux ? Bien ma foi de sujets assez simples et en substance assez universels. À savoir la confiance en soi, la nécessité de s’amuser et de profiter de sa vie au maximum. Licorne et chamallows. Oui, finalement c’est un petit peu un discours Disney transposé en rimes insolentes. Si l’on peut concevoir que princesse Raiponce peut finir en soutif à l’arrière d’un pick-up après avoir torché une bouteille d’Hennessy, bien sûr. Ce qui plait chez Kari, c’est cette élégance dans le fait d’être décomplexée. Car sincèrement, la plupart des rappeuses qui cherchent à se justifier en tant que femme tombent rapidement dans des écueils assez lourds. À savoir soit la biatch phénoménale qui peut choquer Marc Dorcel sans se dénuder, soit la fille qui décide de masquer sa féminité avec du scotch double-face et qui finit par avoir une voix plus rauque que Garou. Kari, elle, parvient à entretenir un juste et doux équilibre, capable de poser des phases violentes en gardant un charme ravageur.

Son charme, elle l’expose et le sublime également sur les réseaux sociaux, bien qu’elle jette un jugement très radical des utilisations qui sont faites de ces mêmes supports. Kari n’aime pas les types aux milliers de followers qui, à partir de cela, se croient devenus des icônes indétrônables. La rappeuse leur refait d’ailleurs largement le portait dans son titre sobrement intitulé « Internet » et en fait une mise en scène assez drolatique dans le clip du très bon « Gadham ». C’est assez amusant, au fond, de voir que les critiques des réseaux sociaux deviennent un sujet fondamental des rappeurs. Le web étant conçu comme un champ de bataille, les « snitch » ou « halfway crooks » des débuts du horrocore sont devenus des « haters » ou des « stalkers » de cette nouvelle vague du rap d’Internet. Conséquences indubitables d’un mouvement investi par les digital natives, élevés dans l’existence indubitable d’une tweet credibility. Kari Faux, sans jamais tomber dans une quelconque sorte de candeur vis à vis du rôle et du poids du numérique sur la nature même du rap, livre un regard à la fois juste et simple sur ce que fait le numérique à la culture hip-hop..

C’est en ça que les deux projets de l’artiste – Spontaneous Generation, et Laugh Now, Die Later – sont formidables de simplicité et de raffinement. L’équation est simple et le résultat est sans appel, Kari Faux envoi du lourd et il va falloir rapidement s’habituer à sa présence. De plus, il semble que depuis sa très récente percée dans le rap, elle a déjà su s’entourer de personnalités, et pas n’importe lesquelles. Notament Childish Gambino avec qui elle a produit le très catchy « Small Talks », ainsi que de Black Party, un producteur bien sympa aux influences assez old school. Et vous connaissez le dicton : le old school, il n’y a pas plus que cool.

Donc si voulez savourez un peu plus les productions de la jeune femme, vous pouvez vous diriger sur son Soundcloud ainsi que sur son site Internet. Des échos nous parviennent et nous font croire à une nouvelle mixtape en préparation. De quoi faire exploser les Internets avec élégance.

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