Titanesque. Ce vendredi 25 octobre, le collectif L’Original faisait venir Kaaris à Lyon, pour la première fois. Booké il y a certainement plusieurs mois, seulement la petite jauge du Transbordeur avait été réservée pour l’occasion : 450 places, au total, bien évidemment toutes vendues. Kaaris, certains de notre équipe l’avaient vu au Canal Street Live, d’autres à la Boule Noire. Tous nous l’avaient confirmé, bien que nous le savions déjà : il faut le voir sur scène pour se rendre véritablement compte de la carrure du bonhomme.
Parce que Gniakoury, on le connaissait quand même déjà pas mal. Mais on avait envie de l’approcher, de discuter avec lui et d’être témoin de l’un de ses massacres scéniques. A 20h, dans le hall de son hôtel, on l’attend sagement pour l’interview d’une vingtaine de minutes qu’il doit nous accorder. Une douzaine de pizzas viennent d’être livrées – la commande du reste de son équipe ne devait pas être encore prête – et attendent là, sur une table, de remplir leur rôle d’hors-d’oeuvre. Le plat de résistance, c’est le public. Son public. Barbe boire le sait : à chaque concert il doit prouver qu’il est bien venu « prendre leur place », ni plus ni moins. A grands coups de crocs, l’animal dominant doit bouffer la concurrence, et ça commence sur scène.
Quand nous le croisons lors de ses balances, plusieurs heures avant le show, Kaaris semble détendu, relâché. Il s’avance vers nous, tend la main. On échange nos prénoms, on se dit qu’on se retrouve plus tard. Le fauve n’était pas encore de sortie. Une heure avant son passage sur scène, quand il descend enfin de sa chambre d’hôtel accompagné de Therapy 2093, il n’est clairement plus le même mec qu’on a croisé dans l’après-midi. La prestance, la démarche, la tension. Tout semble différent. Heureusement qu’il portait des lunettes se dit-on même après coup, tellement on était pas sûr de pouvoir soutenir l’intensité de son regard – percevable derrière l’opacité des verres – pendant la totalité de l’entretien, no joke.
Et ça, c’est sans amplis d’un mètre sur un mètre qui crachent « Bouchon de liège » en fond sonore. Sur la petite scène du Transbordeur, Kaaris a coupé, a emballé, et est reparti. Les épaules de l’homme ne sont jamais plus larges que lorsqu’il est devant un public avec l’intense désir de lui montrer qu’il est le meilleur. Et on va pas se mentir : aujourd’hui, il l’est probablement. Rares, très rares sont les concerts qui terminent par un envahissement du plateau. C’était le cas hier quand des centaines de mecs transcendés ont voulu approcher, saisir ou ne serait-ce que toucher l’alpha avant qu’il ne sorte de leurs champs de vision. On ne sait pas s’il a a vraiment avalé l’hostie de travers ou s’il a juste tout compris. Dans tous les cas, Kaaris, prêcheur ou non, a déjà conquis.