Trois jours, quatre scènes, une soixantaine d’artistes, 118 000 spectateurs et au moins autant de litres de bière enquillés : revenir à Rock-en-Seine, ça fait plaisir. Cette année, j’aurais pu vous livrer les techniques ancestrales pour planquer sa pom’pote aromatisée au rhum, lister les pèlerins accrédités qui ne sortent pas de l’espace presse, ou établir une topologie des festivaliers, de la midinette de 14 ans qui cherche sa première « MD » au pogoteur quadragénaire qui veut apprendre la vie aux minots. A la place, ma conscience me pousse à parler musique, c’est quand même le coeur du sujet, à travers cinq lives que j’attendais en particulier, parmi d’autres. C’est parti.
Le plus hip-hop : Kendrick Lamar
Vu qu’A$AP Rocky nous a placé une quenelle et que Chance The Rapper a été programmé au pire moment possible, notre point G du week-end arrivait dès le vendredi soir. Pas loin du grandiose, le californien a éclaboussé la scène de la Cascade de son talent. « Backseat Freestyle » fracasse d’entrée, puis le rappeur de Compton déroule les titres de « Good Kid, M.A.A.D City » accompagné de ses musiciens, ça change vraiment d’un DJ set banal. Ca remue sur le refrain de « Fuckin Problem » ou de « Swimming Pool ». Excepté « P&P », dommage de ne pas avoir entendus beaucoup de sons antérieurs à l’album, un « Hiiipower » n’aurait pas été de trop. Regrettable aussi qu’une avarie sonore ait poussé K-dot à quitter la scène une petite dizaine de minutes au milieu de son set. Anyway, de loin le moment le plus hip-hop du week-end.
Le plus chill : Patrice
Patrice. Comme il l’avoue lui-même, c’est quinze ans après son premier passage au Domaine de Saint-Cloud qu’il retrouve Rock En Seine. Pendant ce temps, l’Allemand a fait son bout de chemin en enchaînant les albums et en lançant des artistes comme Selah Sue. Mais là c’est avec toute sa troupe qu’il est venu kiffer. De tout le festival, Patrice est celui qui a le plus interagi avec la foule. S’imposant comme un maître des festivals, il enchaîne ses tubes au milieu de ses nouveaux morceaux, ceux qui composeront « The Rising Of The Son » son prochain album prévu pour début septembre. Le chanteur s’autorise même une leçon d’escalade en grimpant sur la scène, un moment fort que partage le public à coup de « Supa Mega Dupa Masta Volume ». Pas besoin d’en dire plus, on vous a dégoté l’intégralité du concert. Et si jamais, il est de retour sur Paris le 2 septembre.
Le plus récréatif : Mac Miller
« Lil B motherfuckin based god ! ». Contre toute attente, le moment le plus improbable du festival est à mettre au crédit de Mac Miller. Omnibulé par le Dieu basé, le rappeur de Pittsburgh va même jusqu’à prêcher la bonne parole en terre parisienne. Hormis ce moment inédit, c’était pas le best show ever, surtout qu’il était affûblé du pire back de la Terre. Du flow à revendre, quelques bons passages sur les morceaux de Watching Movies With The Sound Off avant un « Donald Trump » que toute l’assemblée attendait comme la sonnerie de la récré. Récréatif, c’est le mot pour résumer ce live.
Le plus énergique : Skip the Use
La question à 10 000 balles : comment Mat Bastard tient plus d’une heure à s’égosiller sans se claquer les cordes vocales ? Un coffre incroyable, une énergie débordante et une propension à se désaper en public : le leader de la bande lilloise détonne, tout de rouge vêtu. Certainement l’une des prestations les plus dynamiques, ponctuée de pogos en pagaille et de jeux avec la foule. Clairement un groupe façonné pour tout déchirer en live. Plaisir ultime : la cover de « Smells Like Teen Spirit » qui a fait jumper tout le monde, de 7 à 77 ans.
Le plus festif : Major Lazer
Diplo et sa bande nous promettaient un sacré bordel, ça n’a pas manqué. Les joyeux lurrons ont animé un show un peu sens dessus dessous : jets de confettis plus champagne shower, danseuses au « Bubble butt », lapdance gratos pour un chanceux du public et j’en passe. Diplo s’est même baladé dans sa bulle sur le public local. Bien entendu, les collégiennes ont twerké sur le répertoire de Free The Universe, mais Diplo a forcément varié les plaisirs : de l’impitoyable « Harlem Shake » à « Niggas in Paris », en passant par « Drop It Like It’s Hot », on a eu le droit à tous les univers. Clou du spectacle : la carcasse désarticulée de Stromae qui se ramène en guest surprise et se prête au jeu avec une coolitude assez impressionnante. Chaud !
PS : on a quand même fortement apprécié plein d’autres trucs : le set nocturne de Paul Kalkbrenner, le masque (et le son) de Kid Noize, la prestation de Is Tropical, etc … Par contre, ne comptez pas sur nous pour aller mater Fauve.