Même quand l’événement à ne pas rater se passe outre-Atlantique, on essaie d’y être. L’événement en question, c’était les 20 ans du festival Under Pressure, à Montréal, premier festival de graffiti en Amérique du Nord. Autant pour nous, Français, ça nous dit pas grand chose, autant là c’est un vrai big deal. Retour sur un bel anniversaire, avec postillons sur micro et sprays d’aérosol.
Fatigués de l’image négative que le public a du graffiti et de ses artistes, les deux jeunes graffeurs montréalais Flow et Seaz décident en 1996 de monter un événement d’une journée où, avec leurs amis, ils pourraient peindre en plein jour et partir à la rencontre du public afin de redorer l’image de leur pratique artistique. La tâche n’était pas facile :on vous rappelle qu’à l’époque, l’art de rue n’avait pas autant les faveurs des galeries et négociants d’art qu’aujourd’hui, et qu’il était encore trop associé à la violence et au gang. Pourtant, malgré les déboires avec les propriétaires des murs, la police et la ville, le festival prend forme et ne cesse de grossir au fil des années. Jusqu’à souffler sa vingtième bougie du 5 au 9 août dernier.
Né dans le but de rassembler la communauté, le festival est tenu depuis 20 ans uniquement par une équipe de bénévole qui ne cesse de grandir, au point d’être devenu une vraie famille. Quand la ville où les acheteurs se sont intéressés à Under Pressure, il y a déjà quelques années, la réponse fut claire : il a toujours été hors de question pour ses fondateurs de vendre ou privatiser leur projet fait « par la communauté pour la communauté », comme ils ne cessent de le répéter. Un choix audacieux, mais qui fonctionne. Aujourd’hui, des familles de tout horizon se mélangent lors du festival.
Pourtant, depuis 1996, si le fonctionnement du festival est resté le même sa forme a quelque peu évoluée. Étendu dorénavant sur cinq jours, Under Pressure rend aujourd’hui hommage à toutes les pratiques issues de la culture hip-hop. Après un échauffement de trois jours où nous avons assisté à des soirées live painting, lancement d’expositions et scratch sessions, le gros de l’évènement s’est déroulé le week-end. Pour l’occasion la rue était fermée ; l’occasion de déambuler entre les différentes murales réalisées devant nos yeux, les battles de danse, les concerts gratuits et les tables de marchandise des créateurs locaux. La future génération n’a pas été oubliée, puisqu’un coin enfant était même installé, de quoi susciter de nouvelles vocations.
Habituellement, des artistes des cinq continents font le déplacement pour participer à Under Pressure, cette année, 20 ans oblige, la sélection d’artistes s’est faite sur appel et la priorité était donné aux talents locaux. Ça ne nous a pas empêché de retrouver quelques Français expatriés comme le trio d’Annéciens Monstr, LSNR et Brokovich, ou encore Lapin qui fait le déplacement tous les ans uniquement pour le festival. Mirabolle, MC Baldassari et Turtle Caps aussi, dont on vous a déjà parlé. Coté musique, le festival, qui en 1996 a lancé la carrière de DJ A-Track, habitue son public à un show de clôture gratuit avec quelques grands noms. L’année dernière, Afrika Bambaataa était à l’honneur. On se disait que ce serai difficile de faire mieux, et pourtant : le show a réuni cette année Lord Finesse, DJ Qbert et celui qui est considéré comme le vrai fondateur de la culture hip-hop, DJ Kool Herc. Autant vous dire que la salle de concert s’est rapidement remplie.
En attendant la 21e édition, les murales restes visibles toute l’année dans le quartier. Si vous allez faire un tour chez nos cousins caribous, c’est à ne pas louper.