Une chronique pas trop compliquée : on sélectionne cinq films à conserver dans ta médiathèque, qu’ils soient anciens ou récents. Pour attaquer, on te propose cinq longs-métrages mis en musique par le producteur du groupe le plus mythique de tout les temps. Non content de rythmer les flow du Wu-Tang, RZA a tout au long de sa carrière navigué entre musique et cinoche. Alors que ce soit à côté de Tarantino, Jarmusch ou en solo, on va revenir sur les productions du prince Rakeem. Nous ne parlerons pas ici de l’excellent Man with the iron fist, le dernier film mis en musique et réalisé par RZA, car nous avions tapé une chronique spéciale au moment où le film s’installait dans les salles obscures.
Le chef d’oeuvre : Ghost Dog
Le Hagakure, c’est la bible des samouraï. Un code régissant les us et coutumes de ces fiers guerriers japonais. Alors quand un tueur à gage du ghetto s’en empare pour en faire un mode de vie dans la jungle urbaine, ça pète la classe, obligatoire. Ajoute un score orchestré par le maestro RZA, ça en devient légendaire. Réalisé par Jim Jarmusch en 1999, cette fable prend place dans le New Jersey et conte donc la relation entre ce samouraï des temps modernes et une jeune fille rencontrée lors d’un de ses contrats. Le scénario ne se démarque pas de par son originalité mais appuie une narration rythmée. La musique du WU est plus qu’un simple accessoire et séquence le récit et la brillante interprétation de Forest Whitaker. Classique, comme cette surpuissante scène finale entre deux tauliers.
La scène
Le blockbuster : Kill Bill Volume 1
On a dit beaucoup de bien de ce film. Au point que généralement, quand tu demandes à des gens qui ne connaissent pas trop Tarantino quel est leur film préféré du réalisateur fou, ils te répondent l’habituel « Kill Bill, j’ai vraiment aimé le un, mais le deux est pas mal quand même ». Ce qui se résume à dire : « je ne connais pas trop sa filmographie, mais j’ai le vague souvenir d’Uma Thurman défouraillant un tas de mafieux en pyjama jaune ».
A mon sens, ce film a largement été surévalué par le public et la critique, ça fait partie de ces films faussement mythiques qui nous reviennent en mémoire par bribes. De belles scènes, mais pour la plupart pompées sur le cinéma hong-kongais. Quoiqu’il en soit, le film a un mérite de taille : il a permis à RZA et Tarantino de collaborer, de les faire devenir amis et de transmettre au producteur émérite le virus du septième art. Et ça c’est plus important pour la suite.
La scène
Le navet : Soul Plane
Réalisé par Jessy Terrero, un mec qui clippe pour 50 Cent et Sean Paul, ce film sorti en 2004 tâche le CV du maître RZA. Le film cumule un nombre incalculable de problèmes : scénario tout bancal, acteurs bidons – Snoop Dogg est le plus convaincant, ça dit le level -, plans fades et aucun rythme. Mais si ce long métrage n’avait que ce genre de défauts, à la limite, il pourrait être qualifié de « divertissant ». Sauf qu’il ajoute la tare extrême de caricaturer la communauté afro-américaine à mort. Tout le monde danse, les filles ont des grosses fesses et tchipent a longueur de temps, les mecs ont des grosses montres en or, blabla… C’est juste lourd, beaucoup trop lourd. Donc en plus d’être mauvais, ce film réduit une communauté à des préjugés stupides. Le seul mérite de RZA ? Un thème et une présence plus anecdotique que les formes de Sofia Vergara.
La scène
Le « Wesley Snipes Effect » : Blade Trinity
Le « Wesley Snipes Effect », c’est un facteur qui s’applique à tous les films dont l’ acteur principal ou secondaire est, je te le donne en mille : Wesley Snipes. Une sorte de caution qui transforme ta rediffusion d’un navet absolu comme Passager 57 en : « Ah oui ça c’est une série B, mais bon c’était bien les années 90 ». Un label qui sauve une bonne partie de sa filmo, mais pas même ce dernier volet de la trilogie Blade. Un naufrage. Jessica Biel passe son temps à personnaliser la playlist de son iPod, tandis que Wesley Snipes fighte un Dracula crypto-gay ridicule. Un échec total, au grand dam de Guillermo Del Toro, qui a quitté le navire après un deuxième épisode sympa. Heureusement, RZA en profite pour balancer « Fatal », un morceaux hyper saignant. Ouf.
La scène (enfin le mix)
Le cartoon : Afro Samurai
Je ne suis pas particulièrement fan des anime, je trouve qu’ils reposent la plupart sur les mêmes recettes et j’ai parfois l’impression que les réalisateurs concoctent des plans statiques de trois plombes juste pour économiser du papier. Certains projets sortent quand même du lot et s’illustrent, grâce à la virtuosité de leur dessinateur ou la finesse de leur scénario : Ghost in The Shell, Akira, Cowboy Beepop, et désormais il y a Afro Samurai. La comparaison est forte mais justifiée : un scénario solide et un héros qui décape, une recette mixée à une cadence incroyable. Le thème orchestré par RZA créé un décalage parfait entre ce héros intemporel et le japon médiéval. Sa suite, Afro Samurai : Resurection, est tout aussi brillante que son ainée. Puis bon, Samuel L. Jackson c’est autre chose que Wesley Snipes, hein.
La scène
Mention spéciale
Je ne peux raisonnablement pas faire un article sur RZA et le cinéma sans parler de Coffee and cigarettes. La présence de RZA se résume a une scénette sur les onze que compte ce long-métrage. Mais ce film est vraiment bon. Jim Jarmusch a puisé dans toute sa liste de contacts stylés – BILL MURRAY ALERT – pour faire interagir des acteurs à la personnalité hors du commun devant son objectif. Des ces dialogues émanent une telle humanité, un tel univers que l’on reste captif de la première à la dernière seconde. Le traitement de l’image en noir et blanc permet au film de s’affranchir de toute modalité de temps ou d’espace. Alors si tu l’as loupé, jettes-toi sur ce chef d’oeuvre … Enfin, sauf si t’essaies d’arrêter la clope.