Si les rappeurs étaient des Empereurs romains… (2/2)

samedi 21 septembre 2013, par Antoine Laurent.

Deuxième et dernière partie de notre dossier sur l’analogie entre rappeurs et Empereurs romains. Si vous avez raté la première, mécréants, venez donc jeter un oeil sur les similitudes qu’on a pointé entre 50 Cent et Jules César, The Game et Pompée ou Eminem et Trajan. « Avé Fifty, ceux qui vont mourir te saluent ! » – avouez que ça aurait quand même beaucoup plus de gueule, non ?

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Frank Ocean serait Elagabalus

Ok, celle là était très, très facile. Il est gentil Frank Ocean, il fait pas trop de vagues et il chante vachement bien. Elagabalus, lui, a tellement fait chier les romains qu’ils l’ont poignardé, décapité et jeté dans le Tibre en lui crachant dessus. Par contre, là où il se rapprochait de notre ami Frank, c’est que l’Empereur voulait à tout prix être une femme : il avait filé des millions de pesos à des physiciens pour qu’ils l’aident dans sa transformation et aimait, parfois, se déguiser en femme pour se faire prendre sans besogne dans les bordels populaires de Rome. Elle était facile, je vous avais prévenu.

Jay Z serait Auguste

Avant qu’Auguste ne prenne le pouvoir, la République romaine était en crise, en proie à de violentes querelles internes, au bord de la guerre civile. Avant que Jay Z ne devienne le padre du game, celui-ci pataugeait dans les cendres du conflit intercostal qui venait à peine de prendre fin. Comme Auguste avant lui, Shawn Carter a alors pris les rennes du carrosse Roc-A-Fella pour en faire un Empire, un vrai : il grimpe les échelons, balance une marque de toge à succès [Rocawear, 700 millions d’euros de chiffre d’affaire annuel à l’époque], finit par devenir calife à la place du calife en s’administration le siège de CEO de Def Jam et unit tout le jeu sous une même bannière. Aujourd’hui, il fait l’unanimité et n’a (presque) pas d’ennemis. Auguste a su jouer des coudes pour s’imposer dans un premier temps, notamment en pétant la gueule de Marc Antoine pour se déclarer dictateur à 31 ans. Au début des années 2000, Jay Z a également 31 ans. Lui aussi veut prendre le pouvoir et se placer au-dessus de la concurrence ; il balance deux offensives décisives : « The Blueprint » en 2001, « The Black Album » deux ans plus tard. Emballé, c’est pesé. Tout comme l’Empereur romain, Hova arrive à se faire apprécier par une majorité de ses pairs, au point que les affronts directs [comprendre les tentatives d’assassinant pour Auguste] se font rares et espacés dans le temps. Bref, quoi que l’on puisse dire, devant les Diddy, Master P et autres, le premier véritable empereur du rap game, c’est bien le « CEO of the R-O-C, Hov’ ».

Necro serait Néron

Bien qu’une grande partie de l’opinion générale considère Caligula comme l’Empereur romain le plus dingue, de nombreux historiens estiment, en vérité, que Néron mérite ce titre pour de multiples raisons. Pas pour avoir brulé Rome par contre, parce qu’il y a certaines sources qui estiment que le bonhomme n’était pas dans la cité quand l’incendie s’est déclaré. Dans tous les cas, ça ne l’a pas empêché d’en accuser les Chrétiens et de les cramer par centaines en s’en servant torches pour son jardin. Oh, il a également profité des nouveaux espaces disponibles suite à l’incendie pour agrandir son palais de quelques milliers d’hectares, ce qui n’a pas forcément plu à la plèbe, condamné à devenir SDF et à crever dans la street. C’était un mec incompris, un poète sanguinaire hors du temps qui arrivait tout de même à inspirer une certaine forme d’admiration. Quel rappeur remporte la palme de la folie ? Killer Mike ? ODB ? J’aurai pu désigner Ill Bill, mais la mère de ce dernier a enfanté un personnage encore plus dérangé : le petit dernier de la famille Braunstein, Necro, mérite ce titre haut la main. Comme Néron, il est juif et reste un poète nihiliste incompris. Maitre de la violence verbale comme on en fait plus, Necro est également réputé pour ces vidéos « I Need Drugs » et « White Slavery Part 2 » où, tour à tour, il filme un vieux camé en train de se piquer salement avant de monter un petit court-métrage particulièrement dérangeant sur l’esclavagisme sexuel. Si vous êtes pas encore convaincus, allez rapidement écouter « Dead Body Disposal », « Vaginal Secretions » ou encore « All Hotties Eat The Jizz ». Rien que ça.

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Kanye West serait Caligula

Le parallélisme parfait. Entre Kanye West et Caligula, l’analogie semble idéale, presque naturelle. Caligula, c’est l’histoire d’un narcisse mégalomane qui essaie de jouer les durs. Au départ, tout va pour le mieux. Pendant les sept premiers mois de son règne, tout le monde le kiffe. Au même moment, Kanye West balance « The College Dropout », « Late Registration », enchaine les prods de fou et se permet même un featuring avec les Dilated Peoples. A new king is born. Puis, tout bascule. De son côté, Caligula [même si certains disent qu’une maladie lui aurait pété le cerveau] baise, boit et mange trop. Yeezy lui aussi boit un peu trop – « I’m sorry, but Beyoncé had one of the best videos of all time! ». Caligula s’auto-proclame Dieu – de son côté, Kanye nous sort « I Am God », featuring… God – et se pavane habillé en Apollon, Vénus, Mercure ou Hercule. Complètement amoureux de son cheval, il en fait un sénateur. Kanye West, lui, se donne également corps et âme pour diviniser sa monture perso, Kim Kardashian. Les mêmes, puisqu’on vous le dit. Après, tout ce qui se dit sur les actes de barbarie de Caligula ne peut être vérifié : certaines sources expliquent qu’il adorait scier les gens en commençant par l’anus, qu’il mâchait les testicules de certains torturés, etc. Des trucs qu’on imagine bien Kanye faire, s’il était d’une autre époque.

Complètement amoureux de son cheval, Caligula en fait un sénateur. Kanye West, lui, se donne également corps et âme pour diviniser sa monture perso, Kim Kardashian.

Kendrick Lamar serait Sylla

« I’m Makaveli’s offspring, I’m the king of New York. » BAM. La bombe explose, le rap jeu s’agite dans tous les sens. Diddy lâche un « Ohhhh Shiiitttttt » sur Twitter, Pusha T est plus explicite avec son « I hear u loud and clear my nigga… » Après des années de paix, la guerre civile semble proche. Kendrick Lamar, le rookie qui ne cesse de prendre du galon commence à prendre un peu trop de place pour certains. Le gosse de Cali qui s’autoproclame roi de la grosse pomme, c’est comme si Sylla, big boss des optimates (les aristocrates romains), s’était sacré CEO des populares (les gauchos) de Rome. Et c’est un peu ce qui s’est passé, en gros, quand Sylla – pas un rookie, mais un mec qui prenait de l’ampleur à vitesse grand V – n’a pas déclenché une, mais deux guerres civiles qui ont déchiré la République. Kendrick, à quand la deuxième offensive ?

Bonus : Joeystarr serait Commode

En bonus, parce que la comparaison demeure maigre. Non, là où Commode était le fils de Marc Aurèle – l’un des plus illustres empereurs romains et grand philosophe stoïcien, Didier Morville n’a eu qu’un « père violent, ultra-autoritaire et incapable d’affection, qui l’expulsera du domicile familial à sa majorité », comme l’explique avec tact son Wiki. Expulser son fils adoptif, une initiative à laquelle Marc Aurèle aurait dû d’ailleurs réfléchir, ce qui l’aurait empêcher de se faire assassiner par son sale gosse avide de pouvoir. Peu importe. Là où Commode et Joeystarr se ressemblent, c’est qu’il partage une passion commune : ils aiment bien taper les bêtes. En 2002, Joeystarr se prend un procès dans la gueule par la fondation Brigitte Bardot pour avoir taper un macaque devant les caméras. Commode, qui aimait se prendre pour un gladiateur, était plus sobre : la légende raconte qu’il aurait tué une centaine de lions en moins de 24 heures, décapité une autruche et tué une girafe à grands coups de lances. Brothers in arms.

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