La cérémonie des Oscars t’a déçu(e) ? T’aurais bien vu OrelSan et Gringe remporter un César ? Selon toi, Swagg Man ferait un bien meilleur acteur que Joey Starr ? Pour te détendre et montrer que quand le rap fraie avec le septième art, ce n’est pas tout le temps mauvais, on a sélectionné les meilleurs actes de cette relation passionnée entre rappeurs et cinéma.
Il y a peu de temps, nous vous présentions les pires incursions de rappeurs au cinéma. Nous étions un peu gênés de ne présenter que les nanars mémorables par leur médiocrité et/ou leur contexte fumeux. Comme on s’est sentis mauvaises langues, on a donc choisi de sélectionner aussi le meilleur. Parce qu’après tout, certains ont trouvé qu’Eminem avait parfaitement endossé son rôle dramatique dans 8 Mile et que les frères pétard Method Man et Redman nous ont quand même bien fait rire dans How High.
Pour les rappeurs qui déroulent des textes au kilomètre, devenir acteur est une solution valable, après quelques années fructueuses au micro, pour s’exprimer autrement qu’en musique. Par les univers qu’ils proposent et la mise en scène dans leurs clips, les métiers d’acteur et de rappeur sont d’ailleurs souvent plus proches qu’on ne le pense. Il est donc logique que les essais de certains soient couronnés de succès. Pour parfaire tes connaissances et t’assurer une victoire décisive lors du prochain Trivial Pursuit Edition Rap, voici donc les plus grandes réussites de rappeurs US au cinéma.
Un peu de galanterie pour commencer : si les rappeuses sont assez nombreuses (Eve, Missy Elliott, Nicki Minaj) à avoir sauté le pas, l’éternelle reine des Native Tongues est sans aucun doute celle qui a réussi à s’imposer avec le plus de succès dans sa carrière ciné. Débutant d’abord en tant que second rôle, elle décroche ensuite des têtes d’affiche dans des films comme Beauty Shop (spin-off de Barbershop) ou New York Taxi, où elle reprend carrément le rôle de Samy Naceri. Elle oscille ainsi entre films comiques et performances plus dramatiques. La plupart du temps convaincante, la Queen mène une belle carrière que l’on verrait mal s’arrêter de sitôt.
Lorsqu’il accepte un second rôle dans 2 Fast 2 Furious en 2002, Chris « Ludacris » Bridges ne se doute pas qu’il vient de rejoindre ce qui deviendra l’une des plus grosses sagas de l’Histoire du cinéma. Sommé de revenir dès l’épisode 5 pour ce qui constitue désormais l’Ocean’s Eleven du tuning, il se taille une place de choix dans la saga. Pas de chance, dans un rôle qui est plus ou moins celui de l’expert en technique et du techno-geek (sic). Bonjour la crédibilité ? Sans doute, oui, mais on n’est pas vraiment là pour ça, hein… Tout ce qu’on lui demande dans les films F&F semble en fait se résumer à zyeuter des jolies filles relativement peu habillées dans des décors de rêve avant de faire exploser des gros joujous très chers. Pour ‘Cris, le métier d’acteur semble même une vocation. On se souvient qu’il taclait sur le track de son pote T.I. « On Top of the World » Samuel L. Jackson, qui avait déclaré que les rappeurs wannabe acteurs volaient les rôles à des interprètes plus talentueux. Il lâchait ainsi : « And they say rappers shouldn’t act, nah suckers / We see Samuel Jackson like what’s up motherfucker. » Ouch.
Il y a cette blague dans le (très bon) film Top Five : sommé d’énumérer leurs 5 rappeurs préférés, les personnages en arrivent à 2pac. « S’il était vivant, 2pac siègerait aujourd’hui au Parlement », dit l’un. « Ouais, mais Pac pourrait aussi être le type qui joue dans les films de Tyler Perry », lui rétorque l’autre. En effet, difficile de savoir à quoi aurait ressemblé la suite de la carrière de Tupac Amaru Shakur si celui-ci n’était tombé définitivement lors d’un drive-by shooting. Reste que, dans les années 90, 2pac fut peut-être l’un des rappeurs à pouvoir revendiquer la carrière la plus prometteuse. Trois des films dans lesquels il a joué (Juice, Poetic Justice et Above the Rim) ont participé à l’éclosion de tout un pan du cinéma black. Pan principalement initié par Spike Lee (Do the Right Thing) et poursuivi par les frères Hughes (Menace 2 Society) ou John Singleton (Boyz N the Hood). Plus tard, les morts tragiques de Pac et de son meilleur ennemi Notorious BIG irrigueraient en profondeur les thématiques et l’identité de ce black cinema.
À la fin des années 80, James Todd Smith III, dit LL Cool J (pour Ladies Love Cool James, pour ceux qui n’étaient pas au courant) était un des rappeurs les plus cools du jeu. Mi-gangsta dur à cuire tendance Compton, mi-lover au cœur tendre façon Barry White. Sur ses albums, il réussit à développer ce personnage de mec décontracté, mais à qui il faut quand même pas la faire. Et quand il débute au cinéma, c’est tout naturellement qu’il se dirige vers des rôles de… mec décontracté à qui il faut quand même pas la faire. Après avoir tâté du film d’horreur (Peur Bleue, Halloween : 20 ans après), il joue les flics (Profession : Profiler, S.W.A.T.) et les sportifs (L’Enfer du Dimanche, Rollerball) avec la même aisance. LL n’est pas DiCaprio mais reste qu’il s’acquitte de sa tâche d’acteur avec les honneurs. Comme son pote Ice-T avant lui, il semble en tout cas avoir trouvé le bon filon, puisqu’on le retrouve désormais, en flic toujours, dans la débilo-jouissive NCIS : Los Angeles, qui, pour le coup, semble taillée sur mesure pour son charme cool.
Si l’on omet pudiquement les cas de Will Smith et Mark Wahlberg, qui ont presque totalement stoppé leur carrière musicale après avoir débuté devant la caméra, Ice Cube est peut-être le rappeur ayant réussi la plus belle transition des cabines d’enregistrement aux salles obscures. Il débute d’abord dans des films assez engagés sur la question noire américaine (dont le mythique Boyz N the Hood). Puis se spécialise rapidement dans le divertissement sympathique, avec Friday en 1996 qu’il coécrit. Le succès de cette « stoner comedy » est tel qu’un deuxième puis troisième volet verront le jour, marquant là le début d’une réelle franchise. O’Shea « Cube » Jackson en instiguera d’autres en tant que producteur et interprète, avec Barbershop (trois films, une série télé), On arrive quand ? (deux films, une série télé), 21 Jump Street (deux films, bientôt trois) et Mise à l’épreuve (deux films). Et lorsque Vin Diesel décline la proposition de revenir dans un deuxième volet de xXx, c’est à Jackson que l’on propose de prendre le volant du bolide – un adoubement en tant que star d’action, ou pas loin. Spoiler alert : à l’exception peut-être de Boyz N the Hood, aucun des films précités ne constitue de chef-d’œuvre destiné à rester dans les mémoires. Qu’importe : champion du box-office à chaque fois ou presque, Cube trace devant la caméra son petit bonhomme de chemin, doucement mais sûrement. L’an passé, il a même franchi une étape supplémentaire en devenant lui-même un personnage de cinéma dans le biopic Straight Outta Compton.
BONUS (editor’s cut)
On anticipe le shistorm dans les commentaires suite à la non nomination de Mouss Diouf Mos Def alias Yasiin Bey. Si l’on est évidemment loin de douter des talents d’acteur de l’ex compagnon d’armes de Talib Kweli, on a hésité longuement entre nous, suite à une filmographie moins fournie que ses autres collègues. Promis, la prochaine fois on se rattrape en faisant une chronique entière de sa performance dans 16 blocs.