Weekend Money. Une histoire amusante se cache derrière le nom de ce duo originaire de Brooklyn. Si Ne$$ et Baghdaddy ont décidé de s’appeler comme ceci, c’est pour le folklore gangstériste qui habite les new-yorkais et se manifeste surtout le week end, quand ils font de l’oseille « pour ceux qui savent ce que cela signifie ». On devine bien mais on ne dira rien , on n’est pas des balances. Pour le reste, les Weekend Money sont les pourvoyeurs d’un nouveau style de rap à Brooklyn, se plaçant dans la droite lignée de Das Racist, donc plutôt loin des sonorités old school réhabilitées par la bande de Joey Bada$$. Leur musique, un mélange de genres surprenant et original, assez pour que l’on cherche à en savoir plus sur les deux artistes.
En sortant de soirée un soir comme un autre, Ne$$ ne s’imaginait pas retourner chez lui avec le numéro d’un mec dans son téléphone, loin de là. En tant que playboy attitré, il cherchait plutôt deux trois chattes à caresser. Et pourtant. Ne$$, rappeur en devenir, un projet en préparation sous le bras, va faire la rencontre de son futur partenaire de crime. Un de ses potes lui présente Baghdaddy, un beatmaker qui produit ici et là, pour le fun. Rien de bien sérieux, aucun rappeur n’ayant encore rappé sur ses prods. A la recherche de quelqu’un qui partage la même vision musicale que lui, quelqu’un qui pourrait, avec lui, « faire émerger un nouveau style de musique à Brooklyn », Ne$$ trouve en Baghdaddy la bonne personne. Son leitmotiv ? « Faire du son comme personne ».
“Nous voulons avoir une incidence sur la culture, représenter les gens qui nous ressemblent et les libérer du carcan musical dont ils sont prisonniers”.
A peine les numéros échangés, ils se mettent au travail. Leur maître mot ? L’expérimentation. Tout ce qui peut servir à créer du son passe sous leur main, du xylophone Fisher Price en passant par des cris d’oiseaux ou du tambour sur les arbres. Tout ce qui est offert par ce monde est un instrument de musique servant leur art. C’est à la fois fou et osé, surprenant et ingénieux. Ils arrivent à caser de nombreux genres dans leur soupe, sans la rendre amère. Nas, Nirvana, Justice, Spike Lee ou Freddie Mercury : leurs influences proviennent de tous les horizons. Et ça s’entend dans leur musique.
Dans tous ces arrangements psychédéliques, on perçoit de la trap, de l’électro, du reggae, du hip hop, voire même du rock. Un sacré melting pot qui pose le style Weekend Money et prend forme avec leur premier EP, Naked City, sorti fin 2012. La force de ce projet de 9 titres : emmener dans un autre univers d’un track à l’autre, sans prévenir. Un vrai travail d’orfèvre se cache derrière cet assemblage foldingue. A l’écoute, on ne tombe jamais dans la monotonie. Un exploit réédité il y a quelques semaines de cela avec la sortie de leur second projet, Freddie Mercury, du nom de celui qui fût durant toute sa carrière « un outsider avant de finalement voir ce qu’il a construit exploser ».
Une mixtape de 15 titres qui se place dans la continuité de leur Naked City. Aussi audacieux que décousu, avec en point d’orgue un “We will rock you” de Queen à la sauce Weekend Money. Paroles sales et beat minimaliste, on croirait avoir atterri dans un autre monde. Un monde où cet hymne des stades n’a jamais existé. Il faut soit être fou, soit avoir des couilles de la taille d’un tank pour reprendre à sa manière un tel classique, en amputant les paroles connues de tous pour les remplacer par des punchlines brutes, venues de simples fellas de Brooklyn.
En fait, c’est un peu leur but ultime. Projeter les auditeurs dans un nouvel univers musical sans se poser de question, quitte à perturber ou choquer par cette arrogance artistique. Retranscrire dans leurs morceaux la diversité de la vie new-yorkaise, en caressant l’espoir de fédérer une communauté autour de leur musique.
Leurs 2 premiers projets ne sont que des bribes de l’empire qu’ils comptent bâtir. De grands projets attendent Ne$$ et Bahgdaddy. Par exemple, la création de leur label, Weekend Money Inc, qui leur permettra de rassembler tous les artistes de Brooklyn partageant leur vision. Qu’on se le dise, on n’a pas fini d’entendre parler de ces jeunes loups de Brooklyn.
Crédit photo : Meredith Jenks